Audette Salameh n'est plus à présenter au grand public. Désormais connue par les médias pour l'avoir suivie vingt-cinq ans durant alors qu'elle menait sa bataille à la recherche de ses deux enfants, Christiane et Richard, disparus en pleine guerre civile, Audette aura marqué les esprits et les cœurs non seulement de son vivant, mais aussi à sa mort, qui fut tout aussi tragique et absurde que sa vie.
Fauchée par une voiture au mois de mai dernier alors qu'elle venait de quitter la « tente de protestation » érigée devant le siège des Nations unies, Audette est pratiquement morte à la tâche. Celle de pouvoir déceler, ne serait-ce qu'un indice qui la mènerait à ses enfants que la haine de la guerre lui a arrachés de force.
C'est pour conter son histoire révoltante et sa mort, « encore plus choquante que la disparition de ses enfants », que Wadad Halwani, sa compagne de lutte, a monté un film documentaire présenté mardi soir dans le cadre du Salon du livre arabe. Devant une foule de sympathisants venus exprimer leur solidarité avec la cause des parents des disparus, Wadad Halwani a voulu rendre hommage au courage et à la détermination de cette femme que seule la mort a pu faire taire. Produit avec une simplicité déroutante et avec des moyens extrêmement modestes, le film retrace le parcours pénible et douloureux de cette mère qui a garni sa vie avec les photos de ses enfants et leur souvenir, et puisé sa force dans « l'espoir de les savoir vivants ». « Elle dormait et se réveillait entourée des portraits de Richard et Christiane. Sa tente, qu'elle ne quittait plus, était devenue son foyer, probablement pour fuir la froideur de son domicile », souligne Wadad Halwani dans le film. Elle a redonné vie non seulement à la cause dont elle est devenue la doyenne, mais également aux espaces verts publics qui entouraient l'emplacement des tentes, qu'elle a plantés avec amour, « sans même demander la permission à Ban Ki-moon. Ce dernier s'était-il d'ailleurs intéressé à elle ? » s'interroge la commentatrice du film, dans une allusion on ne peut plus claire à l'indifférence des Nations unies devant lesquelles a été porté le drame des familles des personnes disparues. Tout aussi sourds, « les responsables politiques qui ont fermé leurs portes devant les requêtes d'Audette et de ses semblables », et qui, peut-être un jour, auront un sursaut de conscience, relève Mme Halwani. C'est la raison pour laquelle des échantillons ont été prélevés du corps d'Audette avant l'enterrement, dans l'espoir d'effectuer d'éventuels tests d'ADN « si un jour les responsables politiques décidaient notamment de déterrer les fosses communes datant de la guerre ». Car, conclut la commentatrice, « il est absolument interdit que l'on nous arrache nos rêves et nos espoirs », comme cela a été fait avec Audette Salameh.
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9 years ago
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